La féminisation de l’enseignement supérieur n’est pas récente. Déjà en 1960 – donnée la plus ancienne disponible (il s’agit de générations nées vers 1940-1942) –, les filles représentaient 43 % des effectifs des facultés. Aujourd’hui, 60 % des étudiants à l’université sont des étudiantes, selon le ministère de l’Enseignement supérieur [1]. La parité a été atteinte dans les années 1980 et continue de progresser très lentement depuis 20 ans. Dans l’ensemble de l’enseignement supérieur, les femmes représentent 56 % des étudiants, une proportion stable ces deux dernières décennies.

Les filles ne font pas les mêmes études que les garçons. Seules quelques filières comptent à peu près moitié-moitié d’étudiants masculins et féminins. Ce sont les écoles de commerce (52 % d’étudiantes) et les BTS.

Les bachelières continuent à s’orienter vers les filières considérées comme plus « féminines », les lettres, la santé, le social en particulier. Elles forment ainsi 84 % des effectifs dans les formations paramédicales et sociales et 71 % des effectifs en langues, lettres et sciences humaines, où leur part est restée stable ces dernières années. Les femmes ont continué d’investir les études de médecine (67 % de femmes) et le droit et l’économie (63 %) à l’université. Elles sont ainsi environ deux fois plus nombreuses que les hommes dans ces disciplines.

La part des femmes ne progresse guère en revanche dans l’ensemble des formations d’ingénieurs [2], qui ne comptent en 2023 que 30 % de filles (contre 27 % en 2013). Au rythme actuel, l’égalité dans cette filière serait atteinte dans 70 ans… La situation est un peu moins déséquilibrée dans les classes préparatoires aux grandes écoles, féminisées à hauteur de 40 % en 2023. Mais les progrès y sont à l’arrêt : la part des femmes a même diminué de près de deux points ces dix dernières années. Les étudiantes sont tout de même nettement plus présentes qu’il y a dix ans dans les études scientifiques et sportives à l’université : leur part atteint 44 %, en progression de 7,3 points entre 2013 et 2023.

Ces évolutions résultent des choix d’orientation scolaire, mais se nouent très tôt. Elles dépendent de facteurs très profonds : des rôles sociaux des filles et des garçons, influencés depuis la petite enfance par leur éducation familiale et scolaire et, plus généralement, de la représentation du rôle des femmes et des hommes dans la société. Dès l’école primaire, les filles prennent du retard en mathématiques (voir page XXX).

Par ailleurs, les jeunes filles, du fait de leur éducation, peuvent avoir de bonnes raisons d’éviter certaines filières élitistes et donc plus « rentables » en termes de position sociale, mais qui débouchent sur des métiers très bien payés, mais n’offrant pas toujours la meilleure qualité de vie. Ces « choix » d’études, et par la suite de métiers, ont des effets tout au long de la vie professionnelle, sur les positions hiérarchiques des hommes et des femmes au travail et sur les inégalités de salaire entre les sexes. Si l’Éducation nationale tente d’inciter les filles à choisir les matières techniques et scientifiques, les garçons, en revanche, sont rarement invités à choisir les filières féminisées.

Photo / CC BY NC ND Camille Stromboni

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