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Outre-mer  : une pauvreté et des inégalités de revenus bien plus élevées

La pauvreté touche une grande partie des populations d’outre-mer, bien plus que dans l’Hexagone. Tandis que les plus riches sont très bien lotis.

Publié le 31 mars 2025

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Revenus Pauvreté

Dans les départements d’outre-mer (DOM), le taux de pauvreté atteint des sommets : 77,3 % à Mayotte et près de 53 % en Guyane selon l’Insee (données 2017, dernières disponibles [1]). En Guadeloupe, le taux de pauvreté est de 34,5 %. À La Réunion et en Martinique, respectivement 36,1 % et 26,8 % de la population se situent en dessous du seuil de pauvreté en 2021.

Seuil de pauvreté de 60 % du niveau de vie médian.
Lecture : 77,3 % des habitants de Mayotte vivent sous le seuil de pauvreté.

Source : Insee – Données 2021 pour La Réunion et la Martinique, sinon données 2017 – © Observatoire des inégalités

Graphique Données

Dans les départements d’outre-mer, une grande partie des habitants sont touchés par la pauvreté, souvent particulièrement démunis, alors que les plus riches sont particulièrement bien lotis. Ces derniers disposent de revenus très proches de ceux de la métropole. Ainsi, en Martinique, le seuil d’entrée au sein des 10 % les plus riches est de 3 256 euros mensuels en 2021, alors que les 10 % les plus pauvres touchent au mieux 780 euros mensuels, contre 1 007 euros dans l’Hexagone. D’un côté, la richesse est accaparée par une minorité dont une partie vit d’une économie de rente, faiblement concurrentielle. De l’autre, la plus grande misère persiste, alimentée notamment par de très faibles niveaux de qualifications et le manque d’emplois pour les jeunes. En Guadeloupe par exemple, 45 % des moins de 35 ans, 48 % des peu ou pas diplômés et 83 % des chômeurs ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté.

Les prestations sociales amortissent partiellement les difficultés. Elles font baisser de dix points le taux de pauvreté dans les DOM, contre sept points en métropole. Comme le souligne l’Insee, cela ne vaut pas pour Mayotte, où le niveau des prestations sociales est inférieur (- 50 % pour le RSA) et où les étrangers régularisés doivent attendre quinze ans avant de les toucher. Dans l’île, 80 % de la population vit avec moins de 1 090 euros par mois pour une personne seule, quasiment le seuil de pauvreté.

Les niveaux de pauvreté dans les DOM ne prennent pas en compte les différences du coût de la vie. Selon un rapport du Sénat [2], les prix sont supérieurs à la métropole de 16 % en Guadeloupe, 14 % en Guyane et en Martinique et de 9 % à La Réunion. Les fonctionnaires disposent d’ailleurs d’une sur-rémunération – de 20 % à 40 % par exemple dans les Antilles – pour compenser ce phénomène. Bas niveaux de vie + prix élevés = les populations survivent en se serrant la ceinture, loin des normes de consommation du continent. Elles doivent logiquement activer toutes les autres solutions de « débrouille », de l’entraide familiale ou amicale, au travail non déclaré notamment.

Une absence de données déplorable
Dans l’édition 2020 de notre Rapport sur la pauvreté en France, nous nous réjouissions de disposer enfin de données précises sur la pauvreté dans les départements d’outre-mer. Pour la première fois, l’Insee publiait le taux de pauvreté en 2017 de chacun de ces départements, en utilisant le seuil de pauvreté national (et non un seuil local comme auparavant). Pour ces départements situés hors de la métropole, l’Insee avait pris l’habitude d’utiliser comme référence le niveau de vie médian local au lieu du niveau de vie médian national, comme si les DOM n’appartenaient pas au territoire national. Le niveau de vie local étant beaucoup plus faible, cela réduisait sensiblement le nombre de personnes pauvres, et le taux de pauvreté. Selon l’ancien mode de calcul, le seuil de pauvreté pour 2017 aurait été abaissé à 550 euros mensuels (après impôts et prestations sociales) en Guyane, presque deux fois moins que le seuil national (1 020 euros [3]). En conséquence, le taux de pauvreté se serait élevé à 23 % au lieu de 53 %. Cette situation, qui aurait indigné s’il s’agissait du Cantal ou de la Creuse, n’a pendant longtemps guère suscité de débat. Au fond, la population la plus défavorisée des DOM, du fait de sa prétendue « différence » géographique, devait se satisfaire d’une norme de niveau de vie inférieure à celle de la métropole.

Mais depuis 2020, plus rien : impossible de connaitre la part de la population de Mayotte, de la Guadeloupe ou de Guyane qui vit sous le seuil de pauvreté. Seules la Réunion et la Martinique ont fait l’objet d’une publication. Étant donné l’ampleur de la misère qui accable ces territoires, il est particulièrement grave de ne disposer d’aucune mesure régulière de leur situation sociale.

Crédit photo / CC BY-SA 4.0 - Msire


[1« Une pauvreté marquée dans les DOM, notamment en Guyane et à Mayotte », Insee Première n° 1804, Insee, juillet 2020.

[2« La lutte contre la vie chère outre-mer : pansements ou vrais remèdes ? », Rapport d’information n° 514 (2024-2025), Sénat, 3 avril 2025.

[3Ce seuil prend en compte les DOM.

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Date de première rédaction le 26 octobre 2020.
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